
J’ai commencé la culture selon la méthode d’agriculture traditionnelle, c’est-à-dire, avec un labour profond de 30 à 40 cm de profondeur. La couche de surface, qui se trouve être riche en vie, a été plongée profondément sous la terre. La couche de profondeur s’est trouvée remonté en surface, c’est donc sur un sol déséquilibré que j’ai commencé à faire mes premières expériences. Les adventices poussent naturellement dans un sol qui leur est propice et redonnent à la terre les éléments nécessaires à l’équilibre du sol. La plante peut donc servir de témoin de l’état du sol et nous exprimer s’il y a besoin d’apport extérieur. Le liseron, par exemple, est capable de plonger ses racines à plus de 50 cm sous terre, ce qui lui donne la particularité de remonter les substances nutritives contenues plus profondément dans le sol. Le liseron est donc une plante amie du sol qui aide à rétablir son équilibre et m’a permis de prendre conscience que ma manière de travailler (le sol en l’occurrence) avait besoin d’un check-up complet.
J’ai donc planté mes crocus en buttes, en laissant le sol nu, et me suis vite aperçu que les adventices poussaient rapidement et que ce désherbage sans fin n’avait pas de sens sur un long terme. Le désherbage au printemps suivant, m’a montré une perte de souplesse et de richesse en éléments organiques, la terre était devenue ce que j’en avais fait : un support de culture.
La terre, entité vivante, accueille la vie à différent niveau d’existence, vouloir l’exploiter sans tenir compte de ce fait engendre une lutte stérile qui a des répercutions sur la culture comme sur soi-même. Ces nouvelles données m’ont poussé à rechercher une solution pour pallier aux problèmes, j’ai optée pour le BRF ( Bois Raméal Fragmenté). Le BRF a la particularité de nourrir le sol en se décomposant , la dégradation d’un des composants de ce broyat vert, la lignine va permettre au sol de développer un système mycélien qui est à la base de la régénération du sol.
Le mycélium est une membrane sensible exposée, consciente et réagissant aux fluctuations de son environnement. Des mosaïques entrelacées de mycélium imprègnent les biotopes de membranes conférant de l’information. Ces membranes sont conscientes, réagissent aux changements et, collectivement, prennent soin de la santé à long terme de l’environnement qui les accueille. Le mycélium reste en communication moléculaire constante avec son environnement en élaborant diverses réponses enzymatiques et chimiques à des défis complexes. Ces réseaux sont, non seulement, capables de survivre mais parfois de s’étendre sur une surface couvrant des milliers d’hectares, atteignant, par là-même, la plus grande biomasse qu’il soit possible de générer pour un organisme vivant sur cette planète.Tous les habitats dépendent directement de ces alliés fongiques sans lesquels le système soutenant la vie de la Terre s’effondrerait rapidement. Les réseaux mycéliaux tiennent les sols ensemble et ils les aèrent. Les acides, les antibiotiques et les enzymes fongiques influencent crucialement la condition et la structure des sols Tout au long des saisons, les fungis décomposent et recyclent les déchets végétaux, filtrent les microbes et les sédiments des lessivages et régénèrent les sols. Ultimement, un sol porteur de vie est créé à partir de déchets, particulièrement de bois mort. (Source: Présentation des travaux de Paul Stametz, mycologue.)http://contre-la-pensee-unique.org/blog/2011/02/06/la-mycologie-selon-paul-stamets/
J’ai pu récupérer, au beau milieu de l’été, 4 grosses bennes de branches de platanes, fraichement broyées, que j’ai installé sur mes rangs dans les 3 jours qui ont suivis, d’une épaisseur d’environ 5 centimètres. La particularité de ce BRF d’été, est un mélange de branches qui apporte une certaine structure, de rameaux qui permettent aux champignons de se développés et de feuilles qui nourrissent les bactéries.
Ce broyat frais, aux senteurs prononcées de miel et de foins, servira à nourrir le sol et tous ses habitants, pendant qu’il se décomposera, pour donner à terme un compost des plus stables : l’humus. La décomposition se fait en plusieurs étapes. Elle s’accélère avec la pluie, en 1 mois et demi, on commence à voir des tâches blanches à l’intérieur du BRF et sentir une odeur de champignons caractéristiques du développement mycélien, différentes sortes de champignons peuvent aussi se développer sur le sol tout au long de l’automne.
En parallèle la vie animale revient sous terre, dans mon cas surtout des arthropodes. Ensuite le broyat continu de se désagréger en terreau noir, tout en maintenant l’humidité du sol, la repousse des adventices, en automne, est sensiblement réduite. Un petit bémol est à mettre cependant, avec le liseron, qui semble se plaire et se développer encore plus vite avec une couverture en BRF. La germination des adventices semble aussi considérablement réduite et le désherbage est grandement facilité par ce sol devenu souple, les racines sortent facilement. Le BRF, tout en se décomposant les premiers mois, va puiser l’azote contenu dans le sol, ce qui peut entrainer, ce que l’on appelle la faim d’azote des plantes installées. Le crocus sativus n’est pas exigeant en azote, cependant j’ai pu constater un jaunissement du bout des feuilles en octobre et novembre, que j’attribue à ce manque d’azote. L’équilibre du sol semble revenu en décembre. Je ne constate plus de problème sur les nouvelles pousses.